Comme on le sait, depuis le 1er janvier 2013 et la mise en œuvre des dispositions issues de la Directive 2011/7/UE du 16 février 2011, les professionnels en situation de retard de paiement doivent acquitter, en plus des pénalités de retard, une indemnité de recouvrement fixée forfaitairement à 40 euros par facture.

Cette nouvelle obligation pèse sur tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur

Si le créancier justifie avoir engagé des frais de recouvrement supérieurs à 40 € par facture, une indemnité « complémentaire » est due.

Cette indemnité est destinée à couvrir les frais de recouvrement externes et notamment les honoraires d’avocats.

Ainsi et désormais, les honoraires d’avocats seront pris en charge pas les débiteurs défaillants.

Dans l’esprit des rédacteurs de la Directive, les pénalités de retard, indemnités forfaitaire et complémentaire sont destinées à couvrir les coûts auxquels sont exposés les créanciers en cas de retard de paiement et à décourager la pratique de ces retards qui profitent aux débiteurs en raison notamment du faible niveau des intérêts de retard et à la lenteur des procédures judiciaires.

Jusqu’à très récemment les praticiens s’interrogeaient sur l’application que feraient les Tribunaux de ces nouvelles dispositions et, depuis la mise en place de ce dispositif, les juridictions de première instance étaient plutôt réticentes à accorder l’indemnité « complémentaire ».

Les Tribunaux de commerce de PARIS et de NANTERRE ont tardé à appliquer ces dispositions, pourtant d’ordre public ; d’autres cependant ont opté pour une position inverse en accordant aux créanciers qui le demandent et qui justifient des honoraires d’avocat, l’indemnité complémentaire.
(Certains tribunaux allant même au-delà en faisant droit, au surplus, aux demandes d’article 700 du Code de Procédure Civile.)

Le cabinet Sénési-Rousseau a ainsi œuvré depuis plusieurs années pour que les juridictions de première instance accordent au bénéfice de ses clients cette indemnité complémentaire et a obtenu des décisions favorables de divers Tribunaux de commerce, notamment d’EVRY, de VERSAILLES, de BAYONNE et de TOULOUSE (cf : décision ci-après).

Récemment enfin, la Cour d’appel de PARIS a rendu un arrêt de principe confirmant que l’indemnité complémentaire est bien d’ordre public et, dès lors qu’elle est justifiée, est de droit due par le débiteur (Cour d’Appel de Paris – 9 juin 2017 n° 14/16967)

La Cour précise encore que l’indemnité couvre les honoraires d’avocat aussi bien forfaitaires que fixés en fonction du résultat obtenu.

Autrement dit la totalité des honoraires de l’avocat sont désormais pris en charge par le débiteur défaillant.

Le coût du recouvrement étant à présent supporté par les débiteurs, le volume des demandes judiciaires devrait considérablement augmenter.

A noter également qu’il n’est pas exclu que ces indemnités forfaitaires et complémentaires puissent être obtenues lors des négociations de recouvrement amiable, tout au moins en partie. La négociation sera âpre mais loin d’être impossible, notamment si elle est menée par un avocat, le débiteur se sentant en effet alors très sérieusement menacé par le déclenchement d’une procédure judicaire imminente dont son interlocuteur et son propre avocat sauront lui expliquer l’issue certaine …

Bien évidemment, le succès global du contentieux et du recouvrement dépendra de la rapidité avec laquelle le processus de relance aura été déclenché, de la base contractuelle des accords, de la qualité des CGV et les mesures conservatoires ou garanties qui auront pu être mises en place pour les créances les plus importantes. Pour les créances modestes, la rapidité du déclenchement des poursuites reste le meilleur atout pour le succès.

Ces mesures, et l’application qui en est maintenant faite par nos Tribunaux, sont à saluer.

Elle contribuera, on l’espère, à une modification à terme des comportements de paiement.

Ainsi et en synthèse il faut retenir que les nouvelles dispositions permettent désormais aux créanciers d’obtenir la condamnation des débiteurs au paiement :

  • des pénalités de retard (on rappelle qu’en cas de silence du contrat ou des CGV sur cette question, le taux des pénalités est égal aux taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage)
  • de l’indemnité forfaitaire de 40 euros par facture impayée.
  • d’une indemnité complémentaire égale au montant des factures d’honoraires forfaitaires et de résultats de leur avocat (sur justificatifs).

Il est à noter que l’indemnité forfaitaire n’est pas soumise à TVA, et que ces dispositions sont d’ordre public.

Bien évidemment s’ajouteront également à ces condamnation les diverses autres éventuelle indemnités ou pénalités fixées au contrat ou aux CGV, ainsi que les intérêts au taux légal

Nathalie Sénési-Rousseau
Avocat
Cabinet Sénési-Rousseau & Associés

Source : www.senesi-avocats.fr