Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, prépare les esprits à une forte récession cette année en France. De nombreux économistes tablent désormais sur une chute du PIB supérieure à 5 %.

« Le chiffre de croissance le plus mauvais qui ait été fait par la France depuis 1945, c’est en 2009 après la grande crise financière de 2008 : -2,9 %. Nous serons vraisemblablement très au-delà des -2,9 % » cette année. Auditionné ce lundi par les sénateurs, le ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, n’a pas caché le cataclysme économique que constituent l’épidémie de coronavirus et le confinement de la population pour tenter de l’enrayer.

Il n’est pas le seul à broyer du noir. Les semaines passent et les économistes revoient sensiblement leurs prévisions à la baisse. Evidemment, tout dépendra de la durée du confinement, encore inconnue, et du retour « à la normale », là encore, très incertain. Mais les quelques pourcents de baisse du PIB en 2020 ne sont plus de mise.

Sévère chute

La plupart des experts anticipent désormais une chute de la richesse nationale comprise entre 5 % et 10 %, voire au-delà pour les plus pessimistes. Déjà, il y a dix jours, l’Insee estimait que deux mois de confinement amputaient le PIB de 6 points , ce qui représente un coût de 75 milliards d’euros pour la France. Les économistes de Barclays anticipent une chute du PIB français de 6 % cette année , ceux de Bank of America, de 6,5 % et ceux de Deutsche Bank, de 6,8 %. A chaque fois, les hypothèses sont semblables : deux mois de confinement et une activité qui rebondit au quatrième trimestre, mais ne rattrape pas tout le terrain perdu. Barclays prévoit ainsi que la France ne retrouvera le niveau de son PIB du troisième trimestre 2019 que lors des trois derniers mois de 2021. D’autres comme UniCredit ont des prévisions quasi-apocalyptiques et anticipent une chute de 14 % du PIB cette année. A côté, Natixis et JP Morgan, qui tablent respectivement sur un recul de 4,5 % et 3,5 % du PIB, sont presque optimistes.

Le confinement laissera des cicatrices

Que va-t-il se passer ? Pour la Banque des règlements internationaux (BRI) , « la réduction du PIB due aux mesures de confinement devrait se faire ressentir sur plusieurs trimestres. La chute totale du PIB pourrait être jusqu’à deux fois supérieure aux effets directs du confinement ». Des entreprises vont nécessairement faire faillite avec cette hibernation de l’économie. Sans chiffre d’affaires, elles ne pourront honorer salaires et factures. Les premières semaines, les entreprises les plus faibles seront touchées puis, avec le temps, d’autres, plus solides, pourraient tomber. D’où l’importance de réduire au maximum le confinement. Entreprises en difficulté : les règles changent face à une vague inédite de dépôts de bilan

Plus cette mise sous cloche de l’économie dure, plus les cicatrices seront durablement visibles sur l’activité économique puisque des entreprises plus productives auront fait faillite. Parallèlement, avec la hausse du chômage attendue, le plus probable est que, pour faire face à la récession, les entreprises ayant survécu choisissent de « reporter dans le temps des projets d’investissement et fassent un effort de resserrement des coûts », comme l’expliquent les économistes de Rexecode dans une note.

Aujourd’hui, l’objectif de la politique budgétaire de Bercy est d’éviter les faillites à court terme et de soutenir les entreprises et les emplois en développant le chômage partiel . Il s’agit de permettre à l’économie de rebondir vite. C’est possible mais à moyen terme, il faudra probablement passer par un soutien public de la demande au moment de la sortie de crise.

Source : Les Échos – Guillaume de Calignon