Premier contributeur des financements à court terme des entreprises, le secteur de l’affacturage se prépare à une augmentation des impayés et à une baisse des garanties des assureurs crédit.

Les « Factors » sont en première ligne pour le maintien à flots des entreprises. L’affacturage, cette technique qui consiste à racheter à J + 1 les factures à 60 jours émises par les entreprises à leurs clients, est devenue, en dix ans, la première source de financement à court terme des entreprises, devant le découvert bancaire. En croissance de 10 % par an, l’affacturage a pris en charge un volume de créances de 350 milliards d’euros en 2019. Mais la crise du coronavirus risque de gripper cette belle mécanique.

Deux enjeux face à la crise

Face à ce double choc d’offre et demande, la profession – qui inclut des filiales de grands groupes comme BNP Paribas Factor, BPCE factor ou CA eurofactor ou l’indépendant Factofrance – fait face à deux enjeux. Tout d’abord, assurer le recouvrement des créances. Si les impayés augmentent, alors les Factors auront moins la capacité à financer leurs clients dans le futur.

Ensuite, maintenir les lignes de garantie des assureurs crédit. « La norme est de financer en fonction de la garantie apportée par l’assureur crédit », rappelle un professionnel. En clair, si la garantie d’assurance crédit se réduit, le financement par affacturage se réduit d’autant. C’est pourquoi il est « si important de demander aux assureurs crédit de maintenir leurs lignes de couverture dans les prochains mois », prévient Patrick de Villepin, président de la commission affacturage de l’Association française des sociétés financières (ASF), qui s’est réunie vendredi dernier.

Bénéficier des garanties d’Etat

Pour le premier enjeu, les factors demandent à bénéficier du fonds de garantie de 300 milliards d’euros mis en place par l’Etat. « Intégrer les Factors dans un dispositif de garantie adapté permettrait de compléter les solutions de soutien mises en place par l’Etat au profit des entreprises », souligne Patrick de Villepin. Sur le deuxième enjeu, l’Etat a décidé de soutenir les assureurs crédit avec une garantie publique de 10 milliards d’euros pour éviter des coupures de garantie. Ce dispositif avait déjà été mis en place pendant la crise de 2008, mais il ne concernait pas les polices entre les Factors et les assureurs crédit.

« Si les conditions d’éligibilité devaient faire l’objet de négociations, il serait souhaitable que les Factors soient invités à la table des discussions afin d’être inclus dans la liste des bénéficiaires », souligne Patrick de Villepin, au nom de la profession.

Des impacts attendus en avril et en mai

Pour l’heure, la crise du coronavirus n’a eu que peu d’impact sur l’activité. De fait, l’affacturage « inversé », qui permet à un fournisseur d’être payé avant l’échéance de sa facture, est peu développé en France (6 % des encours contre 50 % en Espagne), ce qui a limité les effets du choc de l’offre.

De plus, de nombreux clients, notamment les grandes entreprises, ont remis leurs factures par anticipation avant le confinement. « Mais une baisse d’activité s’annonce pour avril et surtout mai, quand les entreprises n’auront plus de factures à nous céder. Ce sera alors aux banques de prendre le relais », estime Patrick de Villepin

Source : Les Échos – Eric Benhamou