Eté meurtrier pour les entreprises françaises

Le nombre de redressements et liquidations judiciaires a progressé de 7,5 % au troisième trimestre, selon Altares.

« Il y a une reprise en France. Elle est indéniable », indiquait encore ce lundi le ministre de l’Economie, Pierre Moscovici, sur France Inter. Si le FMI et l’OCDE ont écarté tout risques de récession et ont récemment relevé leurs prévisions de croissance, la reprise tarde, sur le terrain, à se concrétiser pour beaucoup de ménages et d’entreprises. 

Pour preuve, les défaillances continuent de grimper inexorablement. Le nombre de redressements et liquidations judiciaires directes prononcés par les tribunaux de commerce a progressé de 7,5 % au troisième trimestre par rapport à la même période de l’an dernier, comptabilise Altares dans un bilan publié mardi matin. Avec 12.790 procédures (hors sauvegarde), le nombre de dépôts de bilan se situe à un niveau très légèrement supérieur à celui de l’été 2009 (12.657). 

Jamais depuis le début de la crise, l’été n’avait été aussi meurtrier. Il faut remonter vingt ans en arrière, lors de la précédente récession, pour retrouver pire situation : «  A l’été 1993, 13.500 défaillances avaient été enregistrées », rappelle Thierry Millon, responsable des études de la société spécialisée dans l’information sur les entreprises. 

Commerces en panne

Attention, cela ne veut pas dire que les défaillances ont atteint un record absolu cet été. Août n’est jamais un mois de forte sinistralité en France, les entreprises et les tribunaux tournant au ralenti. Les périodes les plus dramatiques sont toujours les trois premiers mois, à l’issue de la clôture des comptes annuels. Le premier trimestre de l’année s’est ainsi soldé par près de 15.900 dépôts de bilan. Sur les neuf premiers mois, 44.900 défaillances ont été enregistrées, soit 4 % de plus qu’un an auparavant. Ce qui veut dire que, en 2013 encore, le nombre de faillites tournera autour de 60.000, soit de l’ordre de 10.000 de plus que ce qui était constaté avant la crise. 

Alors que les premières heures de la crise avaient frappé de plein fouet l’industrie, «  désormais, et depuis plusieurs mois déjà, ce sont les métiers orientés vers les particuliers, affectés par la panne de la consommation, qui sont les plus fragilisés », constate Thierry Millon. Avec un pouvoir d’achat sous pression, les Français font des arbitrages dans leurs dépenses. Des secteurs entiers en subissent les conséquences. Comme celui des coiffeurs, soins de beauté et corporels (avec un bond de 16 % des faillites depuis le début de l’année). Ou encore, celui de la restauration, qui concentre près d’une défaillance sur dix (+ 8 %). Le commerce de détail n’est pas en reste, avec 14 % des défaillances totales depuis janvier, tiré par les activités de bricolage et d’équipement du foyer, l’alimentaire et l’habillement. « Ce coup de froid fragilise en amont les grossistes tels que ceux du négoce de biens domestiques comme l’électroménager et le meuble, où les défaillances s’accélèrent », ajoute Thierry Millon. 

La reprise reste très théorique pour beaucoup de PME. «  Elle profite d’abord aux grosses entreprises industrielles et particulièrement à celles tournées vers le commerce interentreprises (« BtoB ») et exposées à l’international », poursuit l’expert. La sinistralité des grosses PME est bien moins forte qu’en 2009. Si bien que le nombre d’emplois directement menacés par une procédure collective est inférieur de 6.000 à celui d’il y a quatre ans. Mais à 53.000 au dernier trimestre, le niveau reste élevé.

Source : Les Échos – Frédéric SCHAEFFER