L’enquête montre que quatre entreprises sur dix pensent ne pas pouvoir être prêtes au 1er janvier 2023

Tendance La moitié des entreprises n’est pas au fait de l’obligation prochaine de facturer ses clients B2B au format électronique. Le nouveau process s’imposera, au plus tard, d’ici 2025, selon des modalités encore à définir.

La loi est passée. Mais rares sont les entreprises à avoir pris la mesure de l’obligation prochaine de facturer électroniquement tous leurs clients B2B. Une étude menée par OpinionWay, pour Quadient (ex-Neopost) , auprès de plus de 400 entreprises françaises entre mars et mai révèle que la moitié d’entre elles n’est même pas au courant de cette digitalisation à marche forcée . « La loi de finances 2020 impose une facturation électronique entre entreprises au plus tôt le 1er janvier 2023 et au plus tard au 1er janvier 2025. Le calendrier et les modalités pratiques de cette mesure, qui vise principalement à réduire les délais de paiement et à lutter contre la fraude fiscale, seront précisés dans un rapport qui doit être remis par le gouvernement au Parlement d’ici le 1er septembre », précise le PDG de Quadient France, Benoît Berson.

Après les factures à destination de l’Etat et de l’ensemble des acteurs publics , toutes les factures à destination des entreprises sont aujourd’hui concernées . « Cela va toucher une large partie des 2 milliards de factures émises et dont il est communément admis qu’environ 20 % sont aujourd’hui digitalisées, à travers l’un des trois protocoles que sont l’EDI [Echange de données informatisées, NDLR], le dépôt sur un portail ou l’envoi par mail avec une intégrité garantie soit par une signature électronique soit par une piste d’audit fiable », poursuit le dirigeant.

De fait, l’enquête montre que quatre entreprises sur dix pensent ne pas pouvoir être prêtes au 1er janvier 2023. « Il n’y a pas de rejet de cette évolution importante : la majorité des TPE et PME y voient une simplification et une démarche plus écologique. Toutefois, 43 % des répondants pointent les contraintes de cette nouvelle mise en conformité : c’est un nouveau projet qui requiert du temps et de nouveau processus. Les entreprises ont donc besoin de temps pour s’adapter et faire face aux coûts générés par ce projet », souligne Benoît Berson, qui milite pour un étalement des dates d’entrée en vigueur du nouveau texte, à l’image de ce qui avait été fait pour le portail de l’Etat, Chorus Pro. « Il faut de la pédagogie et des explications pour que ce nouveau process puisse être mis en oeuvre, en particulier dans les PME et TPE. L’obligation pourrait donc s’appliquer aux grandes entreprises dès 2023, puis aux moyennes en 2024 et enfin aux plus petites entreprises en 2025. L’expérience de Chorus Pro a montré que c’était une bonne approche », estime le dirigeant.

Le refus d’un système « à l’italienne »

Autre sujet délicat, les modalités de mise en oeuvre, qui ne sont pas encore définies. 80 % des entreprises interrogées préféreraient un envoi simultané de la facture au client et à l’administration fiscale plutôt qu’un envoi unique à une plateforme de l’administration. Pas question, en clair, d’aller vers un système « à l’italienne » où toutes les factures sont déposées sur un portail de l’Etat, qui les renvoie aux destinataires. « L’envoi simultané préserve le lien et la relation commerciale entre le fournisseur et son client. D’autant que la facture est souvent accompagnée d’autres documents, liés à l’encaissement ou au produit. Par ailleurs, les entreprises qui ont déjà mis en place des solutions de facturation électronique souhaitent conserver leurs process, explique Benoît Berson. L’administration ne doit pas être un intermédiaire entre les entreprises, mais un tiers partenaire. Il est tout à fait possible, par exemple, d’envoyer à l’Etat une copie de toutes les factures émises, et ainsi de lui fournir toutes les informations dont il a besoin pour ses contrôles ».

Si le sujet n’est pas forcément prioritaire dans le cadre de la reprise actuelle, il reviendra forcément sur le devant de la scène au cours des prochains mois. « Ce n’est pas un projet très lourd mais il faut quand même mettre en place une équipe, soutenue par un leadership fort, et compter de quelques semaines à quatre mois pour structurer son process. Dans un premier temps, les entreprises doivent réaliser un audit de leurs factures B2B pour en connaître les volumes, la fréquence, les destinations. Il faut ensuite s’assurer que l’autre partie sera en mesure de réceptionner les factures. Autrement dit, on ne peut pas basculer en big bang : l’évolution vers la facturation électronique doit se préparer avec ses clients ; chacun doit choisir le protocole le plus adapté à son organisation. Enfin, comme pour tous les changements de processus, il faudra former les équipes et s’assurer qu’elles sont prêtes à modifier leurs habitudes de travail », recommande le dirigeant.

Source : Les Échos – Cecile Desjardins