Entre le début de l’année et la fin du troisième trimestre 2018, les émissions de titrisations représentaient 180 milliards d’euros, selon l’association pour les marchés financiers en Europe, une organisation au service des grandes banques.

Depuis le 1 er janvier, les banques ayant recours à cette technique financière doivent appliquer des nouvelles règles du jeu. L’objectif est de tirer les leçons de la crise tout en relançant un marché jugé utile à l’économie.

2019 marque un nouveau départ pour la titrisation en Europe. Depuis le 1er janvier, les banques ayant recours à cette technique financière, épinglée pour son rôle dans la crise financière, doivent respecter des nouvelles règles du jeu élaborées à Bruxelles .

Leur objectif est de tirer les leçons de la crise, même si les titrisations européennes n’ont pas connu les déboires de celles liées aux « subprimes » américains. L’idée est aussi de relancer un marché languissant depuis des années. Aux yeux des autorités européennes, la titrisation, qui consiste à émettre des titres adossés à des portefeuilles de prêts, peut aider les banques à alléger leurs bilans, et partant, financer les entreprises et les ménages.

Un marché « sain et sûr »

Cette législation « va permettre de construire un marché de la titrisation sain et sûr dans l’Union Européenne, au bénéfice des investissements, des emplois et de la croissance », assure ainsi Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne en charge des services financiers.

Concrètement, la régulation encourage les banques à émettre des titrisations dites « simples, transparentes et standardisées » (STS), en respectant une batterie de critères. Les banques qui se conforment à ce modèle ont moins de capital à mettre en face de leurs opérations de titrisations, contrairement à celles qui optent pour des montages financiers jugés plus complexes ou opaques.

Ces nouvelles règles du jeu ont beau avoir été discutées pendant plus de trois ans , les banques n’ont pas encore toutes les cartes en main pour les respecter. Les autorités européennes ont en effet tardé à prendre toutes les mesures d’application nécessaires.

Les banques attendent encore des clarifications

Par exemple, les critères à respecter pour émettre une titrisation « STS » ne sont pas tous gravés dans le marbre, indique un connaisseur. Autre source de difficulté : les organismes censés rassurer les investisseurs en certifiant que les titrisations sont bien simples, transparentes et standardisées attendent encore des décisions des autorités européennes ou nationales pour pouvoir commencer leur travail.

Dans ces conditions, le marché de la titrisation pourrait rester atone en ce début d’année, selon certains observateurs. « Il est probable que la plupart des émissions de titrisations seront reportées à plus tard dans le courant de l’année, au moment où on devrait avoir plus de clarté sur les règles et leur interprétation », écrivent ainsi les analystes de Rabobank dans une note.

La politique de la BCE sera déterminante

Reste à savoir si le marché de la titrisation européen rebondira, une fois que toutes les clarifications seront apportées. « A mon avis, cela prendra plus de temps qu’anticipé. Notamment parce que le cadre est plus compliqué que ce qu’on aurait pu espérer », estime Ian Bell, responsable de PCS Secretariat, une organisation qui se positionne pour pouvoir certifier les titrisations.

D’autres facteurs seront déterminants. A commencer par l’évolution de la politique de la Banque centrale européenne. Dans un contexte de liquidités abondantes, les banques ont moins intérêt aujourd’hui à recourir à la titrisation.

Source : Solenn Poullennec – Les Échos