Selon les données des greffes des tribunaux de commerce, la levée du confinement ne s’est pas accompagnée d’une hausse des cessations de paiements. Les entreprises sont encore sous perfusion des aides de l’Etat et les procédures ont été assouplies pendant l’urgence sanitaire

La chute de l’activité économique pendant la crise sanitaire fait planer le spectre d’une vague de faillites dans les mois à venir. Une étude de Coface, dans lequel l’assureur crédit prévoit une hausse des défaillances de 21 % d’ici à fin 2021, est venue le rappeler ce mardi. Mais à ce jour, la levée du confinement ne s’est pas accompagnée d’une hausse des cessations de paiements. Les statistiques des greffes des tribunaux de commerce traduisent même un niveau d’activité… historiquement bas.

D’après ces chiffres, diffusés par le Conseil national des administrateurs et mandataires judiciaires (CNAJMJ), le mois de mai s’est soldé par 1.317 procédures collectives déposées auprès des tribunaux de commerce. Si les dépôts de dossiers se sont accélérés durant le mois, leur nombre reste près de deux fois inférieur au niveau de l’année 2019, qui était déjà une faible année pour les faillites.

9.600 défaillances évitées

A fin mai 2020, le cabinet Altares a recensé au total 13.920 procédures, contre 23.535 l’an dernier à la même période. « On peut ainsi dire que 9.600 entreprises ont évité la défaillance depuis le début de l’année », indique Thierry Millon, directeur des études chez Altares. On est encore très loin du scénario de 2009, où les procédures dépassaient de trois fois ce niveau.

Au début de la crise sanitaire, c’est d’abord la fermeture des tribunaux qui a provoqué une chute des défaillances. Leur niveau s’est contracté de 85 %, avant de repartir en douceur alors que les tribunaux de Commerce se sont dotés de moyens pour traiter les procédures à distance et tenir des audiences en visioconférences. Mais elle reste toujours 40 % en dessous de leur niveau habituel. « Les entreprises ne sont pas allées au tribunal, elles ont été aidées. Quand une entreprise ferme, si elle ne fait pas rentrer d’argent, elle se débrouille pour ne pas en sortir. Tant qu’elle peut mettre ses salariés au chômage partiel, elle peut tenir », observe Thierry Millon.

Assouplissement des procédures

La période d’urgence sanitaire s’est également accompagnée d’ un assouplissement des règles pour les entreprises en difficulté . Celles-ci auront jusqu’au 24 août pour se déclarer en cessation de paiements, alors qu’elles ont habituellement un délai de 45 jours. « Nous sommes dans une parenthèse juridique qui a conduit à ce que les entreprises soient protégées », indique Thierry Millon.

Est-ce le calme avant la tempête ? En toute logique, les défaillances devraient repartir à la hausse dès le mois de septembre , ne serait-ce que parce que l’Etat va progressivement réduire les aides. C’est déjà le cas pour le chômage partiel, et prochainement pour les charges sociales qui ne pourront plus être reportées. Viendra ensuite le temps du remboursement des prêts garantis par l’Etat. Les premières victimes seront les entreprises maintenues artificiellement en vie par ces aides. Mais compte tenu du retard pris depuis le début de l’année, rien ne dit que 2020 se terminera sur un niveau historique de faillites.

Source : Les Échos – Ingrid Feuerstein