Les grandes entreprises prennent de plus en plus conscience de l’intérêt d’élever leurs fournisseurs au rang de partenaires. Avec « Le Top », un speed dating entre patrons, l’Afep espère faire évoluer les mentalités.

Quand on parle de relations interentreprises, le secteur aéronautique est l’exemple vertueux le plus cité. Les grands maîtres d’oeuvre raisonnent depuis longtemps en termes de filière et le Gifas, le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales, s’applique à la structurer, en multipliant les démarches en faveur des PME. Entre 2014 et 2016, 401 TPE, PME et ETI ont profité du programme « Performances industrielles », doté de 23 millions d’euros, tandis que 69 grands donneurs d’ordre les ont accompagné pour monter en compétences.

Résultat : l’activité de la supply chain aéronautique a progressé plus vite que celle de l’ensemble de la profession au niveau international. Et, par ricochet, c’est toute la filière qui en profite : l’an dernier, le Gifas a réalisé 86 % de son chiffre d’affaires de 60,4 milliards à l’export. Fort de ce succès, une deuxième phase de ce programme a été lancée et 300 sous-traitants, dont la moitié issue de la première phase, seront accompagnés jusqu’en 2019.

Autre fleuron français, l’industrie du luxe et de la mode représentait, en 2016, 150 milliards d’euros de chiffre d’affaires direct, dont 33 milliards à l’export, selon l’Institut français de la mode. Un dynamisme soutenu par les poids lourds du secteur, qui destinent 80 % de leur production à l’international.

Difficultés à exporter

Mais, derrière ces deux filières, les autres secteurs sont à la traîne. Tandis que les entreprises allemandes de taille intermédiaire (le Mittelstand) sont admirées pour leurs résultats à l’international, les PME tricolores peinent à grandir et à s’imposer à l’étranger. Le constat est pourtant unanime : pour structurer les filières et gagner des parts de marché, il faut sortir d’une logique de contrats ponctuels et favoriser l’émergence de partenariats durables, fondés sur des intérêts économiques partagés.

Là, les grandes entreprises, riches en ressources techniques et juridiques, ont un rôle à jouer. C’est la conviction de l’Afep, l’Association française des entreprises privées, qui organise le 10 février un speed dating entre grands patrons et dirigeants de PME et ETI. Cette initiative s’inscrit dans une tendance d’amélioration des relations. Chartes de bonnes pratiques, labels et normes ISO s’imposent de plus en plus et les agendas se remplissent d’offres de rencontres interentreprises (associations, syndicats, clubs…). « Il y a dix ans, il y avait très peu de propositions de ce type. Aujourd’hui, les initiatives foisonnent et il est même parfois difficile pour les PME de repérer celles qui leur seront le plus utiles », constate un acteur du secteur. L’attente est réelle. D’après une étude de Pacte-PME, 51 % des dirigeants aimeraient recevoir ponctuellement l’expertise d’un grand groupe pour se renforcer.

« Une réelle opportunité de business »

Cette association leur propose toute une palette d’outils pour accélérer leur développement, faciliter les mises en relation et, bientôt, favoriser la coexportation. « L’objectif est d’aider les grands comptes à compléter leur offre à l’export en y associant des PME », explique François Perret, directeur général de Pacte PME. « Les grandes entreprises jouent le jeu dès qu’elles ont un intérêt à le faire. Ce n’est pas du mécénat, mais une réelle opportunité de business qui leur permet d’être plus fortes sur les marchés étrangers. »

Mais, pour que cela fonctionne, « il faut aussi que les PME fassent des efforts et acceptent parfois d’ouvrir leur capital ou de créer des groupements d’entreprises », estime-t-il. Au début des années 2000, 125.000 entreprises françaises étaient présentes à l’export, « un nombre qui n’a pas progressé depuis ».

Le recours à la médiation

Entraide, dialogue, mais aussi médiation pour résoudre les litiges commerciaux. « Le principe même de la médiation est de plus en plus connu », se réjouit Pierre Pelouzet, le médiateur des entreprises. En témoigne le nombre de saisines : 1.200 en 2017, contre 1.000 en 2016. « C’est un outil efficace, qui aboutit à un accord amiable dans trois dossiers sur quatre. Une véritable culture est en train de s’implanter dans notre pays », constate-t-il.

A Bercy, on mise aussi sur le développement des PME pour augmenter les exportations. En octobre, le ministre de l’Economie lançait le label « French Fab » pour promouvoir à l’international l’industrie française de pointe. Dans le cadre de la future loi PACTE, une nouvelle devise s’est imposée pour aider les entreprises à se développer : « grandir, innover, partager ». « On ne s’interdit rien », promet Bruno Le Maire.

Retards de paiement : un plus bas historique

Avec moins de 11 jours de retard (10,93) en moyenne au deuxième trimestre 2017, les délais de paiement sont au plus bas en France, selon les chiffres du cabinet Altares. Une amélioration insufflée par un renforcement de la réglementation, de la prévention et des sanctions. Une grande entreprise sur deux a changé ses procédés après un contrôle, selon une enquête de CompinnoV. La prise de conscience du danger que font peser sur les fournisseurs les dépassements de délais est aussi mieux intégrée, les retards de paiement étant à l’origine d’une défaillance d’entreprise sur trois.

Parmi les bons élèves, le secteur du BTP. 60 % des entreprises paient sans retard. Mais, dans le transport, la communication ou l’industrie, seules un tiers respectent les délais. Certains services de l’Etat peuvent également mieux faire, avec des délais moyens dépassés de 12,9 jours (et qui grimpent même à 18,8 jours pour les collectivités régionales). En Europe, la moyenne privé/public se situe à 13,2 jours de retard : la France est en 3e position, loin derrière les Pays-Bas (5,9 jours) et l’Allemagne (6,8 jours).

Source : Les Échos – Elisabeth Hu