Les entrepreneurs seront libérés de leurs dettes au bout de trois ans pour leur donner une « deuxième chance ».
Quelque 200.000 entreprises font faillite chaque année dans l’Union européenne, détruisant 1,7 million d’emplois. PME et TPE en tête : à peine une entreprise sur deux, en Europe, survit plus de cinq ans après sa création. Tout à sa relance de l’économie, Bruxelles veut mieux protéger les entrepreneurs et leurs créditeurs en dotant l’Europe d’une forme de « chapitre 11 ” à l’américaine. C’est l’objectif de la proposition de directive sur l’insolvabilité et la restructuration dévoilée mardi par la commissaire européenne à la Justice, Vera Jourová. Maîtres mots : harmonisation et anticipation. Harmonisation car la forte disparité des régimes entre Etats demeure « une vraie barrière aux investissements transfrontaliers », insiste-t-elle. Anticipation car c’est la clef, selon la Commission, tant les lourdeurs ou les manques de certains dispositifs nationaux ne laisseraient pas aux entreprises dans une mauvaise passe ou un trou d’air l’opportunité de s’adapter. « L’absence de dispositif de restructuration de la dette dès l’apparition des difficultés conduit beaucoup d’entreprises viables à disparaître “, souligne la commissaire Jourová.
Simplifier les procédures
Cela ressort de l’état des lieux dressé : les pays qui facilitent les restructurations le plus en amont, comme l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Finlande, affichent une moindre mortalité des entreprises et permettent aux créanciers de recouvrer plus vite une part plus importante de leur mise. La directive prévoit de développer et de généraliser des « outils d’alerte ” pour aider les PME, et leurs créanciers, à repérer en amont les risques de dérapage, et des « cadres flexibles de restructuration préventive » pour simplifier les procédures judiciaires. A noter que le volet social n’est pas affecté : le droit du licenciement reste inchangé. Le texte impose la création d’un « délai de respiration », de quatre mois (jusqu’à un an dans certains cas) durant lequel l’entreprise en difficulté pourrait interrompre le paiement de ses banques et fournisseurs. Ce dispositif existe déjà dans certains pays. Le dirigeant serait aussi assuré de rester durant cette période maître dans la gestion de son entreprise, avec des possibilités réduites d’ingérence des créanciers. Mais ensuite, pour rassurer ces derniers, les procédures d’insolvabilité seraient simplifiées et accélérées. L’autre mesure phare promeut une vraie « deuxième chance » pour les entrepreneurs après un échec : ils seraient « entièrement libérés de leurs dettes » après un délai maximal de trois ans. En Allemagne par exemple, il est de sept ans. La puissante AFME, qui représente les banques d’affaires du continent, salue la copie : elle y voit un« cadre européen cohérent »qui devrait faciliter l’accès des PME à des financements en permettant « une réduction des coûts pour les investisseurs et une amélioration du taux de recouvrement ». «Des procédures plus rapides vont rassurer les prêteurs, aujourd’hui échaudés par leur complexité et inefficacité “, note Paul McGhee, son directeur stratégie. Le chemin est long : le texte doit encore être examiné par le Parlement et le Conseil européens.