Revue de Presse – Les Echos – 03.10.14 “Un programme d’achats de crédits titrisés pendant au moins deux ans”

La BCE va intervenir dans les marchés des crédits titrisés et d’obligations sécurisées dès la mi-octobre.

La Banque centrale européenne (BCE) a décidé d’aller vite , quitte à tâtonner un peu au démarrage. Le programme d’achats de crédits titrisés (ABS) et d’obligations sécurisées émises par des banques (« covered bonds ») commencera donc dès ce trimestre, avec une première vague d’achats dès la mi-octobre. Les opérations dureront au moins deux ans.

Signe que la BCE veut se laisser des possibilités d’ajustement , elle n’a mentionné aucun montant pour ses interventions, contrairement aux attentes des analystes. Mario Draghi, le président de l’institution, a simplement signalé que la taille du marché visé allait jusqu’à 1.000 milliards d’euros. Mais, étant donné les différentes contraintes, la force de frappe sera plus modeste

L’objectif est de pousser les établissements financiers à distribuer davantage de crédits à l’économie réelle (crédit consommation, hypothécaire, PME…) en leur offrant un débouché. La BCE leur achètera ces crédits agrégés en paquets (c’est la définition d’un ABS). Avec une règle d’or : « Nous nous concentrerons sur des ABS simples et transparents », a rappelé Mario Draghi.

Attirer des acteurs privés

L’institution n’achètera donc que les tranches les plus sûres ou certaines tranches dites « mezzanine » (un peu moins sûres), à condition que celles-ci soient garanties. Reste que, à ce stade, aucun Etat n’a accepté d’apporter sa caution. Le sujet est même explosif dans certains pays.

« Ce qui frappe, c’est l’effort de flexibilité de la BCE », note Frederik Ducrozet, chez Crédit Agricole CIB. L’institution a vu aussi large que possible. Elle a notamment inclus dans son programme les ABS que les banques ne mettent pas sur le marché, mais « à condition que des investisseurs participent » aussi. Par exemple, la BCE pourrait acheter 70 % d’un ABS habituellement non commercialisé, si les 30 % restants sont pris par des fonds d’investissement. Une manière aussi de recréer un marché de la titrisation en Europe, en attirant des acteurs privés. Par ailleurs, la banque centrale achètera aussi bien sur le marché secondaire que lors des émissions.

Aucune précision n’a été fournie sur la répartition des interventions selon la nationalité des titres. Mais la BCE a indiqué que les titres chypriotes et grecs seraient concernés, même si le geste est d’abord symbolique vu la taille de ces marchés. Le risque lié à leur mauvaise note de crédit (ces pays sont notés en catégorie spéculative) est compensé par l’aide financière que l’Europe leur apporte et par un calibrage des interventions.

Est-ce que ce programme très innovant va changer la donne ? Mario Draghi a beaucoup insisté sur l’effet cumulé des mesures prises par la BCE sur la taille de son bilan. Les achats d’actifs s’ajoutent aux grands prêts destinés aux banques pour relancer le crédit. Le premier prêt accordé en septembre n’a pas provoqué une ruée au guichet de l’institution, mais les spécialistes estiment que celui de décembre aura davantage de succès. La BCE espère sans doute pouvoir s’en tenir à ça . Les indicateurs d’inflation anticipée le diront.

Source : Les Échos – Isabelle Couet