Revue de Presse – Les Echos – 04.09.14 “Droit à l’échec : une réforme pour rebondir”

Droit/ La réforme des procédures collectives instaure le rétablissement professionnel

La France compte 63.000 nouvelles procédures collectives par an, dont un tiers  de liquidations judiciaires impécunieuses d’entreprises sans salarié. L’ordonnance portant réforme des procédures collectives, entrée en vigueur au 1er juillet, instaure une nouvelle procédure : le rétablissement professionnel. Elle permet de sortir ces « petites » procédures des statistiques des procédures collectives. « Cette procédure d’enquête est sans doute l’innovation la plus importante de l’ordonnance, celle qui fera date, analyse Arnaud Pédron, avocat (Taj). Elle va réduire potentiellement de 20.000 le nombre de procédures collectives et redorera l’image d’une France entreprenante. »

Rétablissement professionnel pour les TPE

Concrètement, le rétablissement professionnel  est réservé aux personnes physiques (et donc ne s’adresse pas aux sociétés), sans salariés et dont la valeur de l’actif est inférieure à 3.000 €. Autre critère pour en bénéficier : ne pas avoir fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire depuis 5 ans. Pour Arnaud Pédron, c’est « l’expression même de la culture en vogue de la seconde chance accordée aux seuls entrepreneurs en difficulté non récidivistes. Cette procédure ne produit pas les effets néfastes d’une procédure collective comme le dessaisissement de l’entrepreneur. Au contraire, elle facilite son rebond. »

En effet, au final, au terme d’une simple enquête de 4 mois, le rétablissement professionnel aboutira à l’effacement des dettes déclarées. « Mais ce coup d’éponge furtif sera refusé au chef d’entreprise qui aura menti sur sa situation patrimoniale. », avertit l’avocat. Dans ce cas de figure, le tribunal ouvrira une procédure de liquidation judiciaire classique.

Accélération des clôtures de liquidations judiciaires

Dans le même esprit, l’ordonnance permet une accélération des clôtures de liquidations judiciaires. « Aujourd’hui, elles durent trop longtemps, par exemple à cause d’un actif invendable ou bloqué dans une succession ou encore en raison d’un procès en cours qui traine en longueur », constate Arnaud Pédron. Désormais, la clôture pourra être accélérée. Cela allègera la charge des tribunaux et favorisera le rebond des dirigeants.
L’ordonnance supprime également la dissolution automatique de la société du fait de sa liquidation judiciaire. Si elle est renflouée, elle pourra reprendre son activité et donc renaître de ses cendres.

Limiter le risque de contentieux

Autre nouveauté de l’ordonnance, l’extension de procédure : en cas de confusion des patrimoines, une procédure collective ouverte sur une entreprise pourra être étendue à une autre entreprise. « Désormais, l’entreprise concernée peut elle-même demander cette extension de procédure avec un objectif  d’efficacité : mieux gérer la restructuration du groupe dans son ensemble, analyse Arnaud Pédron. Ce groupe, pourra également bénéficier de la désignation d’un mandataire de justice commun à l’ensemble des procédures collectives qui auront été ouvertes auprès de différents tribunaux (mission de coordination). »
Enfin, dans la lignée d’une décision du Conseil Constitutionnel de décembre 2012, la saisine d’office du tribunal est supprimée. Désormais, dans un objectif d’impartialité, le tribunal ne pourra plus décider seul d’ouvrir une procédure collective (ce qui concerne 3,2 % des affaires). «En revanche, le président du tribunal pourra souffler le mot au Ministère Public. Une saisine d’office déguisée ? », s’interroge Arnaud Pédron.
Toutes ces nouveautés  s’orientent vers un but : la rationalisation de la procédure et la limitation des  risques de contentieux. Une bonne nouvelle pour les entreprises et leurs conseils.

Source : Les Échos – Valérie Talmon