Revue de Presse – Les Echos – 12.09.14 “Le big bang des paiements inquiète les banquiers centraux”

Un très récent rapport pointe les risques des nouveaux modes de paiement.
La route vers une réglementation mondiale est encore longue.

Le calendrier est parfois facétieux. Mercredi, Apple présentait en son et lumière sa solution de paiement maison appelée à prendre d’assaut le marché américain. Quelques heures plus tôt, c’est en toute sobriété que la Banque des règlements internationaux (BRI) publiait un rapport intitulé : « Les non-banques dans le paiement de détail ». La banque centrale des banques centrales y pointe les risques opérationnels ou juridiques posés par l’apparition de nouveaux acteurs sur la chaîne des paiements. De plus en plus complexe (voir l’illustration ci-contre), elle paraît de fait plus difficile à sécuriser. Afin de s’approprier des données bancaires, « les fraudeurs vont sans doute cibler les points où la sécurité est la plus faible », relèvent les auteurs. D’autres défis concernent directement les consommateurs, par exemple si leurs habitudes de paiement étaient couplées à des informations liées à leurs centres d’intérêt ou si leur service de paiement faisait faillite.

Intérêts stratégiques divergents

Les auteurs du rapport se demandent aussi ce qui arriverait si un de ces acteurs non bancaires devenait omniprésent sur son métier et connaissait un jour une panne technique d’ampleur. Enfin, les réglementations varient fortement – d’une zone géographique et d’un métier à l’autre. Ce cadre n’est donc pas adapté à des acteurs agissant souvent à l’échelle mondiale. A titre d’exemple, PayPal est actif dans le transfert d’argent aux Etats-Unis, mais enregistré en tant que banque au Luxembourg.

Sur la question du « que faire ? », la BRI laisse le lecteur sur sa faim. Il faut dire que les intérêts stratégiques varient fortement. En Inde, par exemple, la tendance n’est pas à freiner le mouvement du non-bancaire. La priorité y est donnée à l’accès de la population aux services financiers et le paiement y contribue. Mais la ligne de fracture la plus forte sépare l’Europe – plus régulatrice – des Etats-Unis. Outre-Atlantique, l’attitude traditionnelle est plutôt d’assumer une part de fraude, au motif qu’il s’agit d’une variable économique parmi d’autres. L’idée sous-jacente est que personne n’a intérêt à ce qu’il y ait trop de fraude, car elle est coûteuse.

Pas sûr, dans ces conditions, qu’une réglementation unique émerge rapidement. D’autant que les consommateurs sont friands de ces nouvelles solutions. Et que la facilité d’usage l’emporte parfois sur la recherche de sécurité.

Source : Edouard Lederer, Les Échos