L’Union nationale des huissiers de justice demande la mise en place d’une procédure simplifiée pour aider les entreprises à recouvrer leurs créances.

Rares sont les petites entreprises qui osent entamer une procédure de recouvrement contre leurs clients mauvais payeurs. Rien d’étonnant quand on sait qu’il faut compter aujourd’hui un minimum de 200 euros et entre trois et six mois de procédure pour décrocher la « procédure d’injonction de payer » qui peut permettre de récupérer ses fonds auprès d’un créancier. « La procédure actuelle, qui comporte trois phases, n’est plus adaptée aux petites créances commerciales, tant par son coût que par son délai. En effet, la requête, après sommation de payer, doit être présentée devant un juge, afin qu’il soit dressé un extrait d’ordonnance puis, une fois ce document signifié, le juge doit à nouveau y apporter la formule exécutoire, à défaut d’opposition. Le nombre de recours est aux alentours de 3 % », explique Patrice Gras, président et porte-parole de l’Union nationale des huissiers de justice (UNHJ, syndicat patronal de la profession et principal réseau d’huissiers en France).

Quand le débiteur reçoit le titre exécutoire, il dispose d’un mois pour régler la créance. S’il ne le fait pas ? « Il peut voir ses comptes bancaires bloqués, son matériel et ses véhicules saisis ou même se voir assigné en redressement judiciaire… Dans la plupart des cas, les créanciers s’acquittent de leur dette, quitte à négocier un étalement du paiement ». Mais il faut en moyenne 134 jours pour parvenir à ce titre exécutoire, soit quatre mois et demi après l’introduction de la demande d’injonction de payer. « Le délai est en partie dû à l’intervention du juge, qui met 50 jours à rendre l’ordonnance en moyenne, puis au temps nécessaire au greffe pour notifier l’ordonnance au créancier », indique l’UNHJ.

Un délai raccourci et un coût moindre
Profitant de l’occasion du Grand Débat, l’Union nationale des huissiers de justice propose la mise en place pour les créances « B2B » d’une procédure simplifiée – déjudiciarisée – qui ne coûterait que 60 euros environ, pour une créance de 500 euros, et prendrait seulement un mois. « Un officier public et ministériel – le greffier des tribunaux de commerce – pourrait se substituer au juge : lorsqu’une créance entre professionnels est constatée par une facture, et qu’elle n’est ni payée ni contestée dans un délai d’un mois, le débiteur ayant été dûment informé de la possibilité de cette contestation et de ses conséquences, le créancier devrait pouvoir demander au greffier de conférer force exécutoire à sa créance », explique Patrice Gras, qui estime que « la réduction de coût et de délai de cette procédure simplifiée permettrait à un grand nombre de TPE, PME ou artisans d’y faire appel ».
Reste que cela fait plusieurs mois que les huissiers tentent de faire entendre leur voix. Le train de la loi Pacte est maintenant passé, mais ces professionnels espèrent aujourd’hui convaincre les responsables politiques de l’intérêt de leur proposition. « Il suffirait de changer deux textes du Code de Commerce et un du Code de Procédure Civile d’Exécution pour qu’elle soit rapidement applicable, et profite à l’ensemble des petites entreprises. Face à l’ampleur des créances impayées en France et aux difficultés que cela entraîne dans les entreprises, il est de notre devoir de tenter d’apporter des solutions… », plaide le président de l’Union, qui a envoyé début mars sa proposition à une quinzaine de représentants de l’Etat, dont Emmanuel Macron, Bruno Le Maire, Gérald Darmanin, Richard Ferrand, Sébastien Lecornu, au moyen de lettres… signifiées par huissiers. On n’est jamais si bien servi que par soi-même.

Auteur : CECILE DESJARDINS

Source : Les Echos