Les retards de paiement seraient la première cause de faillite des entreprises en France

Tendance 56 milliards d’euros : c’est le montant des créances passées en pertes chaque année par les entreprises françaises. Il s’agirait de leur première cause de faillite, notamment chez les PME. Les retards de paiements sont-ils pour autant une fatalité ? Le 9 e baromètre ARC/Ifop et une étude de l’UNHJ répondent.

Si les bons comptes font les bons amis, ils maintiennent également les entreprises à flot. En France, 25 % des défaillances d’entreprises seraient dues à des retards de paiement, ce qui en ferait la première cause de faillite. A l’échelle nationale, cela représente 56 millions d’euros de créances passées en perte chaque année. Analyse des chiffres clefs de ce phénomène et des solutions proposées par le 9e baromètre cabinet ARC/Ifop ainsi que l’étude de l’Union nationale des huissiers de justice (UNHJ), menée avec le même organisme de sondage.

PME contre grands comptes, un combat inégal

Le retard de paiement fluctue et les données historiques n’incitent pas à l’optimisme : il se situait à 14 jours en 2012, à 10 jours en 2014, mais a remonté à 14 en 2015… Il est en moyenne aujourd’hui de 10,9 jours pour les PME en France. Cette dernière donnée marque une légère amélioration par rapport aux 11,5 jours de 2018 et surtout aux 14,5 jours de 2017. S’agit-il d’une amélioration sur le long terme ou bien d’un simple effet de cycle ? Il est encore trop tôt pour se prononcer. Quant aux grands comptes, ils endurent des retards moins conséquents : 8,9 jours en moyenne en 2019, contre 10,1 l’année passée.

On constate une asymétrie dans les relations entre PME et grands comptes, qui paient en moyenne les PME avec 9,2 jours de retard. A l’inverse, les petites et moyennes entreprises les paient avec seulement 5,7 jours de trop. Un décalage qui s’explique par le poids des grandes entreprises dans les carnets de commandes des PME. 61 % des dirigeants interrogés estiment que les services commerciaux peuvent être réticents à relancer une grande entreprise, par peur – pour 86 % d’entre eux – de perdre un client important. Quant à l’autre solution qui consisterait à délaisser les grandes entreprises pour se tourner vers les marchés publics, elle n’est pas si simple : 56 % des PME s’y refusent par crainte de ne pas être payées à temps, voire pas du tout.

Vers une procédure simplifiée de recouvrement ?

Les huissiers, sollicités notamment pour les procédures de recouvrement, ont  décidé de se saisir du problème . Selon une étude publiée par l’UNHJ, 72 % des dirigeants d’entreprise seraient favorables à l’instauration d’une procédure déjudiciarisée pour recouvrir les impayés.

« Aujourd’hui, il faut compter entre trois et cinq mois après la demande pour obtenir une injonction de payer du tribunal » déplore Patrice Gras, président de l’UNJH. Un délai jugé extrêmement long par les dirigeants de TPE et de PME. L’intervention obligatoire d’un juge, qui prend en moyenne 50 jours pour rendre l’ordonnance, allonge considérablement le procédé.

« Notre proposition consisterait à simplifier cette procédure en substituant un greffier au juge. Le délai pour obtenir une injonction de payer passerait alors à 40 jours en moyenne. Et la démarche ne coûterait plus qu’environ 60 euros, contre plus de 400 actuellement », expose Patrice Gras.

« Les impayés ne sont pas une fatalité. Cette mesure permettrait de dissuader les mauvais payeurs. Il s’agit d’une véritable avancée dans la moralisation des affaires en France » conclut-il. Une mesure déjà mise en place depuis quatre ans en Belgique, et qui semble porter ses fruits. La proposition de loi, qui devait être incluse dans la loi Pacte finalement attendre le prochain véhicule législatif (au mieux en février) avant d’être examinée. Véritable solution ou nouvelle mesure inefficace ? Réponse l’année prochaine dans le 10e baromètre.

Pistes de solutions

Au-delà des  solutions préventives déjà existantes , les dirigeants souhaitent des mesures concrètes contre les mauvais payeurs. 87 % estiment que les retards en délais de paiements doivent être inclus dans les notations des entreprises par les agences. 74 % que leur inscription dans le rapport RSE doit devenir obligatoire. 69 % que l’affacturage inversé collaboratif dans le secteur public ne permet pas de les réduire dans les marchés publics. 66 % qu’il est possible de les réduire avec des factures dématérialisées. 14 % que la publication dans la presse locale de la sanction de l’entreprise fautive (à ses frais), prévue par la loi Pacte, sera efficace. Source : étude ARC

Auteur : Jean-Marie Cunin

Source : Les ECHOS