Grâce à vous et depuis plus de 20 ans, l’AFDCC produit son enquête annuelle sur les comportements de paiement. Cette étude fiable et reconnue permet à votre Association de mettre en avant les grandes tendances “terrains” et les impacts des différentes réglementations sur le quotidien des entreprises. Cette année encore, notre étude est reprise dans le Rapport de l’Observatoire des Délais de Paiement.

Découvrez la synthèse de son contenu ci-dessous (lien de téléchargement du rapport à la fin de l’article).

 

Malgré les tensions d’approvisionnement et le retour de l’inflation en France et chez ses voisins européens, l’année 2022 a vu la poursuite des évolutions encourageantes des délais de paiement constatées l’année précédente par l’Observatoire.

Les retards de paiement, tels que mesurés par Altares, atteignaient ainsi 11,7 jours à fin 2022 contre 12,4 jours un an auparavant. La proportion des « grands retards » (à plus de 30 jours) retrouve son niveau d’avant-crise sanitaire à 6%. Tous les secteurs bénéficient de cette évolution même si les secteurs hébergement-restauration / débit de boissons et transport-logistique restent à des niveaux plus élevés (autour de 16 jours contre 12 jours pour les autres secteurs).

La France conserve également sa place dans les bons élèves européens, se situant sous la moyenne européenne (13 jours), les pays du Nord demeurant les plus vertueux (Belgique, Allemagne, Pays-Bas). Cette évolution favorable se retrouve dans l’analyse menée par la Banque de France sur la base des données comptables pour l’année 2021. En effet, 2021 voit la reprise de la tendance à la baisse des délais clients et fournisseurs, tendance à l’œuvre depuis 2017 qui avait été interrompue en 2020 par la crise sanitaire. Les délais fournisseurs se situent à 48 jours d’achats (– 1 jour par rapport à l’année précédente) et les délais clients à 42 jours de chiffre d’affaires (– 1,2 jour par rapport à l’année précédente).

Cependant des disparités structurelles entre tailles d’entreprise persistent : les petites et moyennes entreprises (PME) demeurent les bons élèves en termes de délais de paiement fournisseurs puisque près des trois quarts d’entre elles règlent leurs factures en moins de 60 jours. Elles restent la catégorie d’entreprise la plus pénalisée par les retards de paiement, avec un effet négatif global sur leur trésorerie que l’on peut estimer à 12 milliards d’euros en 2021.

En regard, la part des grandes entreprises réglant leurs fournisseurs sans retard diminue légèrement entre 2020 et 2021, passant sous les 40%, ce qui globalement correspond à un transfert indu de trésorerie au bénéfice des grandes entreprises. En conséquence, depuis début 2022, la cotation des entreprises de la Banque de France tient davantage compte des comportements de paiement en intégrant, dans l’approche qualitative, l’existence de délais de règlement excessifs, imputables à des sociétés en bonne santé financière, elles-mêmes réglées dans les délais.

Les tendances sectorielles relevées par la Banque de France en 2021 confirment une évolution favorable : la totalité des secteurs, à l’exception de celui de l’hébergement-restauration particulièrement touché par la crise sanitaire, ont réduit leurs délais fournisseurs. Le secteur du conseil et services aux entreprises voit pour la première fois ses délais passer en dessous du seuil de 60 jours fixé par la loi de modernisation de l’économie (LME). C’est également le cas du secteur de la construction qui affiche pour la première fois depuis 2006, des délais fournisseurs moyens inférieurs à 60 jours, notamment grâce à un recul effectif et longtemps attendu des délais clients, constat partagé par la fédération professionnelle du secteur. Il convient toutefois de rappeler qu’il existe une hétérogénéité forte au niveau infrasectoriel en matière de comportement de paiement.

Bien que ce panorama soit plutôt positif, les incertitudes économiques pèsent sur les anticipations des entreprises. Les différentes enquêtes menées par les organisations professionnelles pour l’Observatoire montrent l’inquiétude d’un dérapage des délais de paiement clients en 2023.

En conséquence, de nombreuses entreprises déclarent porter une attention encore accrue à la gestion de leur poste client (prévention du risque, amélioration du recouvrement de créances) tout en reconnaissant, pour certaines, payer leurs factures dans des délais non acceptables. En outre, les délais de paiement dans la sphère publique constituent toujours un point d’alerte pour de nombreuses entreprises fournisseurs. Des évolutions organisationnelles engagées depuis des années par la direction générale des Finances publiques (DGFip) (dématérialisation, pérennisation de l’expérimentation des centres de gestion financière, automatisation de certains processus de dépenses) ont permis des gains certains en termes de délais de paiement : pour les services de l’État, malgré une hausse de 14% des demandes de paiement, les délais globaux de paiement se sont à nouveau réduits de 1,5 jour entre 2021 et 2022 pour atteindre 14 jours, ce qui est un résultat très satisfaisant.

En revanche, les collectivités territoriales et la fonction publique hospitalière voient en 2022 leurs délais globaux moyens de paiement s’accroître de 1,3 jour pour s’établir à 28,9 jours, reflet d’une hausse du prix des intrants se répercutant sur les marchés publics et la trésorerie des collectivités territoriales et des établissements publics de santé. Même si ce délai moyen reste inférieur à la limite de 30 jours qui prévaut dans le secteur public, cette tendance, qui concerne toutes les tailles et tous les types de collectivités, s’inscrit à contre-courant de plusieurs années d’amélioration régulière.

Dans ce contexte, l’Observatoire souligne à nouveau l’importance qu’attachent les entreprises à la mise en œuvre de la base de données des délais de paiement des collectivités locales prévue par la loi PACTE. Celle-ci permettrait aux entreprises de s’informer avant de répondre à un appel d’offres public et aurait vraisemblablement un effet pédagogique sur les comportements de paiement de certaines collectivités.

Au-delà, les organisations professionnelles attendent beaucoup du déploiement complet de la facturation électronique, qui devrait être un vecteur de progrès significatif pour réduire les délais de paiement. Le rapport présente comme chaque année les résultats des contrôles conduits par la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) en 2022. Avec 1 219 établissements contrôlés, privés et publics, et un taux d’anomalie constaté de 33%, la DGCCRF confirme les constats des années précédentes et notamment les défaillances des entreprises en matière d’organisation comptable (circuits de validation des factures trop longs ou complexes, centres de services partagés situés à l’étranger) qui sont à l’origine de nombreux retards. Les entreprises de grande taille sont particulièrement concernées par ces dysfonctionnements, ce qui fait écho aux travaux menés en 2021 par l’Observatoire en partenariat avec l’Association française des entreprises privées (AFEP) (cf. précédent rapport).

Le Code de commerce donne aux commissaires aux comptes un rôle dans la chaîne de vérification du respect des dispositions légales applicables aux entreprises en matière de délais de paiement. Après avoir alerté dans son précédent rapport sur l’absence de pertinence de l’attestation demandée aux commissaires aux comptes, concernant les délais de paiement des sociétés dont ils certifient les comptes, l’Observatoire recommande cette année que soit engagé un travail concerté avec les parties prenantes pour faire évoluer ce dispositif et lui permettre d’atteindre ses objectifs.

Enfin, l’Observatoire participe avec intérêt aux travaux préliminaires engagés par la Commission européenne pour réformer la directive européenne Late Payments et contribuer ainsi à la constitution d’un Observatoire européen des délais de paiement sur le modèle français, le plus abouti en Europe.

JEANNE-MARIE PROST PRÉSIDENTE

GUILLAUME RICHET-BOURBOUSSE RAPPORTEUR

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