La loi Macron qui prend forme au Parlement est censée renforcer la concurrence dans le secteur de la distribution. Nombre de ses dispositions s’inspirent ouvertement d’avis de l’Autorité de la concurrence. D’abord l’amendement qui limite à neuf ans la durée des contrats d’affiliation aux réseaux coopératifs et franchisés. Le but est de faciliter le changement d’enseigne des magasins indépendants et de faire monter les enchères en matière de services offerts par les centrales d’achat. Au bénéfice du consommateur final, veut croire le gouvernement.

Autre mesure : les injonctions structurelles qui permettront à l’Autorité de la concurrence d’exiger des baisses de prix dans une zone de chalandise donnée. L’Autorité doit aussi être prévenue deux mois à l’avance de la constitution de supercentrales d’achat. Par ailleurs, il est aussi question de porter à 5 % du chiffre d’affaires – soit 2 milliards pour certains groupes ! – les pénalités prononcées par la justice civile en cas d’abus dans les relations commerciales entre un distributeur et un fournisseur. Un amendement, pour l’heure retiré mais qui pourrait revenir, voulait aussi renforcer la notion d’abus de dépendance économique.

Quelques mois après la loi Hamon qui a beaucoup augmenté les pouvoirs de sanction de l’administration, les distributeurs subissent donc un nouveau renforcement de leur encadrement. Est-ce nécessaire, alors que la guerre des prix tire d’ores et déjà les prix de la consommation à la baisse ?

Un rapport publié en septembre dernier par de la Direction de la concurrence – justement – de la Commission européenne indique que la France affiche l’un des indices de concentration moyen (selon le savant indice de Herfindahl-Hirschmann) de la distribution alimentaire parmi les plus faibles d’Europe (1.410 contre 1.811 au Royaume-Uni et 1.957 outre-Rhin), quand, à l’inverse, l’indice de concentration des fournisseurs est parmi les plus élevés (2.130 en France contre 1.359 en Allemagne, par exemple). L’étude démontre en outre que Casino et Carrefour ont perdu 40 % de leur marge opérationnelle en dix ans, tandis que leurs fournisseurs industriels français sont 5 fois plus rentables qu’eux.

Au final, le coup de pouce donné à la concurrence ne trouvera peut-être sa pertinence qu’au niveau local, dans quelques zones où certaines enseignes dominent.

Source : Les Échos – Philippe Bertrand