Conséquence directe de la politique monétaire volontariste de la BCE pour sauver l’économie européenne du spectre de la déflation, près de 20 % des fonds monétaires court terme – placements diversifiés, liquides et réputés comme les plus sûrs – voient leurs performances basculer en territoire négatif. Sont, pour l’heure, essentiellement concernées des gestions investies en titres d’Etat, mais le risque que le phénomène s’étende au cours des prochains mois n’est pas négligeable. Les banques, incitées par les nouvelles règles Bâle III à capter la manne des trésoreries d’entreprise pour renforcer leurs ratios prudentiels, avaient développé une offre de comptes et de dépôts à terme proposant des rémunérations attractives. Mais leur intérêt se réduit, au moment où la BCE leur garantit un guichet ouvert à taux zéro pour se refinancer. L’argent des entreprises deviendrait même embarrassant. Mais les dirigeants d’entreprise ne peuvent accepter l’érosion de leurs encours de trésorerie. Cet actif, stratégique en temps de crise, a été préservé et renforcé au prix de durs sacrifices pour les salariés et les actionnaires. L’industrie de la gestion collective se pose en recours, elle qui a assisté, impuissante, au mouvement de décollecte en France des fonds monétaires (100 milliards d’euros retirés depuis avril 2012). Les contraintes imposées aux supports de la catégorie AMF monétaire court terme imposent de se tourner vers des alternatives pour pallier la situation. Aux directeurs financiers d’accepter l’idée que leur trésorerie, portée à des niveaux record, a vocation à être investie plus largement dans des produits à horizon plus long. Si toutes les solutions disponibles de placement sécurisé ne sont pas forcément éligibles au label comptable IAS 7 – qui offre l’avantage de déduire l’investissement réalisé du calcul de l’endettement net – la configuration actuelle des marchés présente a minima l’avantage d’inviter les entreprises à engager une réflexion structurelle sur la taille et la composition de leur dette.
Source : Les Échos – David Laugier
